Neuvage, bricolage et Transavia !

Quelques jours après le baptême du bateau à Porquerolles, nous avons pris la direction de la Corse embarquant les papi-mamie à bord.

J’avais repéré une belle fenêtre de début de mistral le 29 juin. Le temps de nous dégager des îles, le vent s’est vite établi à 20 nds avec des rafales allant jusqu’à 25 nds et une houle de 2m bien orientée s’est rapidement installée. Tous les éléments étaient réunis pour un run magnifique jusqu’à Calvi. Nous nous relayions à la barre avec papa et avons pris un pied phénoménal à engager le bateau dans les surfs et à garder la vitesse jusqu’à la vague suivante… J’ai quand même gagné le challenge vitesse avec une pointe à 18 nds  😉

Au bout de 3 heures, nous étions très en avance sur le routage et étions partis pour traverser en moins de 10h. Pour rester dans la bulle de vent nous avions un petit contre-bord d’une heure à faire. En pleine euphorie, je décide d’envoyer le premier empannage (virement vent arrière), conscient de la vitesse du bateau et du vent, je décide de me mettre très proche du vent arrière, chariot de grand voile au centre, on envoie… et patatras : le gennaker s’est déventé et n’a pas tourné, il s’est enroulé autour du solent (la petite voile d’avant qui reste à poste et qui tient aussi le mat) ….

Vent arrière, on empanne, réempanne, rien n’y fait, on a surement tiré un peu trop fort sur les écoutes, on a passé plus de 2 heures à tout tenter pour finalement sécuriser la bulle qui s’est formée au milieu de la voile avec une autre drisse et limiter les dégâts sur notre belle voile. Nous finirons la traversée sous grand voile seule au vent arrière… Fin du run et grosse angoisse à bord, on aurait dû faire comme-ci, comme-çà. A ce moment-là nous ne savions honnêtement pas ce que nous aurions dû faire.   

Le lendemain matin, au mouillage, je monte au mat pour dérouler la bulle par le bas, avec pour seul résultat de tétaniser des avant-bras, le papi fait une tentative par le milieu de la bulle, il ramènera l’antenne wifi qu’il a cassée mais pas mieux… Peu fier, je me résous à appeler les secours et donc le SAV Outremer. Stéphane me démoralise : pas de solution à Calvi, il faut emmener le bateau à Ajaccio sans garantie de sauver la voile… 7h de nav avec notre cocotier, ça ne fait vraiment pas marrer…

C’est le moment que notre bonne étoile a choisi pour nous envoyer un gars rigolard en paddle qui a pointé son nez à l’avant du bateau… « Vous êtes en galère ? » ben comment te dire…  « C’est facile, ça m’est arrivé en transat, suffit de décrocher la drisse par le haut ! » Bref, le mec monte à bord on se regarde un peu tous et c’est Marion qui monte en tête de mat. Elle a passé 2 h à dérouler dans un sens puis dans l’autre pour enfin libérer la voile que l’on a pu descendre sur le pont. Trop concentré à sécuriser Marion, je n’ai pas fait de photos mais l’image restera gravée en moi longtemps : ma chérie suspendue dans le vide au-dessus de la voile qui se regonflait c’était magnifique et tellement stressant à la fois. Chérie, je t’aime !

La voile va bien, elle ne présente aucune trace de cette galère. L’analyse des causes de l’accident a démontré que :

  • Cocotter un spi est arrivé à tous les marins
  • Nous n’aurions surtout pas dû tirer sur les écoutes et réempanner immédiatement
  • Nous aurions dû rester un peu plus loin du vent arrière et ouvrir le spi avant d’envoyer
  • Pour encore plus de sécurité, nous aurions pu dérouler tout ou partie du solent
  • En revanche il fallait éviter de rouler le gennak pour empanner dans ces conditions, il y a toujours un risque de cocotter

L’émotion est retombée et nous avons pu profiter de Calvi, de la citadelle et moi, me remémorer mon premier job. A 18 ans, j’avais préféré venir faire le moniteur de planche à voile et de cata plutôt que de finir les épreuves du bac… Les heures sombres de ma relation avec mes parents😇

Nous avons pris la route de Saint Florent avec un stop sur la belle plage de Saleccia malheureusement encombrée de déchets plastiques, nous en avons profité pour faire notre première collecte en portant les couleurs de The Sea Cleaners !

Sur la route de Saint Florent, Marion s’étonne que nous n’ayons plus d’eau dans le réservoir tribord que nous venions de remplir… Elle n’a pas fini sa phrase que l’alarme de pompe de cale se déclenche ! Je comprends vite que nous avons vidé 200 l d’eau dans la cale moteur ! La mamie a mal rangé la douchette de pont qui a explosé sous la pression… Avarie sans conséquence puisque nous avons trouvé de quoi réparer à Saint Florent mais bon ça aurait pu être un problème…

Retour à Calvi pour une escale rapide avant de prendre la route du sud et après quelques heures de moteur on prend un peu de vent 10, 12 puis une rafale à 15 nds, nous sommes sous code 0 (la belle voile noire) et le loop en dynema qui la tient par le bas explose…. Deuxième avarie de voile en 3 jours… Rien de grave, on roule tant bien que mal et je change la pièce que j’avais en spare mais bon c’est quand même bizarre.

Route du sud avec de jolis bords sur lesquels on lâche un très joli monocoque qui était venu nous chatouiller et puis le vent tombe. On met les moteurs pour la visite de Scandola au bout de quelques minutes, Marion me demande pourquoi je n’ai allumé qu’un moteur, bah j’ai du mal appuyer sur le bouton… En fait si mais le moteur ne veut plus démarrer…. Je serre un peu les fesses au milieu des falaises (le site est sublime) et j’appelle Girolata pour réserver une place pour la soirée afin d’être en sécurité. Manœuvrer un cata de plus de 15m avec un seul moteur entre des bouées serrées et des bateaux, c’est quand même un peu chaud mais on s’amarre à la bouée. Malin comme un renard, j’utilise ma caméra étanche et ma perche pour aller voir sous le bateau si on n’a pas pris une algue ou un sac plastique dans l’entrée d’eau… La caméra s’éteint immédiatement au contact de l’eau, j’avais mal refermé le capuchon étanche du chargeur… Il faudra en commander une autre ! J’invite l’équipage à partir en visite avec le paddle et moi je plonge sous le bateau mais ne trouve rien. Je descends dans la cale moteur tribord pour voir ce qu’il se passe, j’applique la méthode de ma grand-mère : je trifouille un peu tout et…  guess what ? Ça redémarre ! 1 fois, 2 fois, 3 fois, ça tourne comme une horloge ! Je suis trop fier et on peut aller fêter çà au resto. L’endroit est génial, c’est à 7 km de la première route, encerclé de roches ocres, il y a des vaches sur la plage, un château et des petits restos sympas.

Girolata a été ravagé par la tempête du 18 aout et il n’est pas certain que nous retrouvions cet endroit dans les mêmes conditions…

Le lendemain, le moteur tourne parfaitement jusqu’aux calanches de Piana où nous avons encore passé une journée magnifique même si le papi a failli emboutir l’annexe dans les grottes 😉

Le moteur ne redémarrera pas, il faudra le réamorcer régulièrement jusqu’à Ajaccio où un technicien interviendra avec une approche plus professionnelle. Il trouvera une prise d’air en sortie de réservoir, la colle ne résistant pas à la chaleur…  Ça commence à faire beaucoup en quelques jours.

Nous débarquons les papi-mamie qui reprennent le ferry pour Toulon et nous avons une grosse semaine tout seul pour aller chercher l’autre mamie à Olbia. On prend notre temps et on profite de nos sites préférés avant que la foule n’arrive : Roccapina, Bonifaccio, les Lavezzi, Piantarella ! La Corse, c’est beau partout, l’eau est magnifique, il fait beau, il fait chaud, personne ne nous attend nulle part et nous en profitons pour décompresser et nous reposer. On a quand même quelques petites bricoles à réparer, ou à régler mais rien de bien méchant… Nous allons en Sardaigne dans le sud des Maddalena pour aller récupérer la famille de Marion qui doit arriver en avion le dimanche 17 juillet. Transavia les préviendra la veille que leur vol est annulé ! La mamie est en feu, les vacances sont foutues, le plan était de les déposer à Cagliari la semaine suivante et d’y récupérer Corentin qui lui aussi avait eu quelques déboires aéronautiques. Un coup d’œil à la météo, une remontée à Ajaccio semble jouable le lendemain. On annule donc la Sardaigne et notre programme en Italie pour pouvoir accueillir tout le monde. La mamie a embarqué sur le champ toute la famille dans la voiture et roulé toute la nuit pour prendre le premier bateau du dimanche à Toulon !! 🤣

Nous avons fait une très jolie nav de 80 mn (150 km) en 7 heures et nous étions au port pour les accueillir à l’arrivée !

Après une dizaine de jours entre Corse et Sardaigne, nous les redéposerons à Porto-Vecchio. Le dessalinisateur fait des siennes et l’eau n’est plus buvable, il devrait tenir jusqu’à notre retour.  

Nous profiterons ensuite d’une semaine de teuf avec nos copains d’Outremer. Nous nous sommes retrouvés à Santa’Manza, nos 4 bateaux seuls au mouillage (Peems, Yeoma, Five et nous) dans un cadre magnifique, avec une plage rien que pour nous sur laquelle nous avons fait quelques soirées bien festives !  😉

C’était vraiment chouette.

Le dessal ne s’arrange pas et j’ai dû déconnecter une membrane (sur 3) car il ne produisait plus d’eau. Du coup on a un tuyau d’arrosage au milieu du bateau… Mais de l’eau dans les réservoirs !

Encore quelques jours et quelques jolis bords avec Corentin et Eva entre Corse et Sardaigne avec un super mouillage à La Pelosa puis nous sommes repassés à Ajaccio déposer Eva chez sa maman. La météo commençait à me tracasser nous étions derrière un front froid qui générait pas mal d’instabilité et les orages qui étaient restés jusque là sur la montagne venaient maintenant en mer avec des vents assez forts et difficilement prévisibles. Une jolie fenêtre d’Est se présentait et puis il fallait aller réparer le dessalinisateur pour lequel je venais de déconnecter la deuxième membrane, nous ne produisons plus que 20l/h.

Une dernière nuit à Chiuni sous les Orages durant laquelle Marion a géré seule la veille car, au contraire de moi, elle n’arrivait pas à dormir. C’est vrai que les vidéos étaient assez impressionnantes…. Je n’ai rien entendu…

La traversé s’est déroulée comme sur le plan avec 20 nds de vent ¾ arrière mais une houle assez croisée, nous avons mis une dizaine d’heures pour atteindre les iles d’Hyères avec un accueil exceptionnel de dauphins, une baleine et quelques thons qui sautaient à l’arrière du bateau !

Nous sommes à la fois contents d’avoir échappé à la tempête Corse et vraiment désolés pour les 50 bateaux qui sont partis à la côte. Car la tempête passée, ils ne sont pas sortis d’affaire, ils ne savent pas quoi faire des bateaux, les chantiers ne peuvent pas les accueillir et si les locataires sont rentrés chez eux les propriétaires qui, comme nous vivent sur leurs bateaux, ont dû rester présents pour éviter les pillages.  

Une journée pour réparer le dessal en mode Mac Gyver et encore quelques jours en baie de Hyères, surtout à l’Estagnol, avec les copains pour finir avec une nav de rêve afin ramener le bateau à la Grande Motte : petit air, pas de vague mais le bateau qui glisse à 8/9 nds le tout en un seul bord sous gennaker !

Le neuvage peut commencer (retour au chantier), il y a un peu de boulot pour les équipes Outremer avec une centaine de points correctifs. On croise les doigts pour que le bateau soit prêt pour notre grand départ le 13 septembre !

Ces deux premiers mois sont passés comme un éclair, on a un peu eu l’impression de rentrer de vacances en ramenant le bateau, nous avons tout bien rangé et nettoyé. La pression commence à monter avant le grand départ, là c’est pour de vrai, l’atlantique et quelques grandes navigations… Je peaufine mes outils de routages et relis mes cours de météo car nous nous attendons à d’autres événements météorologiques jusqu’à la sortie de la méditerranée.

A bord, tout va bien, nous avons pris nos repères, nous avons l’impression de maintenant bien connaitre le bateau et de le maîtriser. Elisa sait maintenant nager et elle a ses petites missions à bord : moteurs, quelques nœuds et la veille des filets de pêche.

Si nous avons des rôles plutôt bien répartis, nous nous devons d’être interchangeables, nous prenons toutes les décisions à deux et constatons que la confiance mutuelle commence à prendre un sens réel. Pour se rendre d’un point A à un point B cela constitue à chaque fois une analyse des conditions de vent et de vagues qui vont définir notre route et nos conditions de navigations : pas assez de vent, trop de vent, vent de face, vent arrière, houle croisée, … Nous confrontons nos lectures et décidons ensemble si nous partons ou pas. Le truc magique c’est qu’il n’y a jamais de tension sur ces sujets même si comme en voiture, j’ai parfois le pied un peu lourd sur l’accélérateur. 😉

Nous avons en tout cas le sentiment d’être prêts !

Ps: aucun bateau ne nous a doublé de l’été ! 🤣

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7 commentaires sur « Neuvage, bricolage et Transavia ! »

  1. Grâce à ton récit on a l’impression d être avec vous sur le bateau. Nous espérons que tous les points SAV seront réglés dans les temps et que vous pourrez entamer votre voyage l’esprit tranquille. Bises. Catherine

Répondre à Fabrice ReyAnnuler la réponse.

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